Métavers : pourquoi faut-il protéger vos marques dès aujourd’hui ?

Qu’est-ce le Métavers ?

En anglais on parle de « metaverse » et en français on utilise plus couramment le terme « métavers ». L’étymologie du mot nous renseigne fort bien sur sa signification, « Méta » signifiant « au-delà » et « vers » désignant le mot « univers ». Nous obtenons donc « au-delà de l’univers » ou « univers parallèle »[1].

L’ambition du Métavers porte sur la création d’un monde numérique à part entière composé d’une réalité virtuelle et d’une réalité augmentée. Le « successeur d’internet » ou encore le « WEB3 » ne verra dès lors pas le jour dans toutes ses fonctionnalités avant quelques années. A terme, le Métavers permettra :  

  • une immersion totale, un parfait condensé de réalité virtuelle et de réalité augmentée ;
  • d’avoir une identitévirtuelle par l’utilisation d’un avatar numérique à son image (des sites existent déjà permettant la création d’un méta-avatar/humain) ;
  • d’avoir son propre système économique avec sa propre monnaie, cryptomonnaies, NFT, etc. ;
  • d’organiser un univers permanent, comme notre monde, sans jamais pouvoir être mis en pause, avec une notion du temps identique à la nôtre, un monde virtuel 24h/h24 7/7 ;
  • une sociabilisationà distance où les individus pourront interagir entre eux et créer des liens sociaux.

Pourquoi s’intéresser au Métavers ?

Les entreprises voient dans cet univers un potentiel financier et social gigantesque.

Le groupe Facebook Inc. désormais renommé « Méta », investit massivement sur cet univers promettant que le métavers « permettra d’interagir avec d’autres personnes qui ne se trouvent pas physiquement au même endroit que vous, et vous donnera encore plus l’impression d’être avec elles en personne » mais également de communiquer, travailler, jouer et même effectuer des achats.

Visite virtuelle d’une cité antique dans le métavers tel que l’imagine Meta/Facebook. © Facebook

Microsoft travaille également sur un Métavers nommé « Mesh » couplé avec Team et plus axé sur le télétravail. Dans cet univers, il sera notamment possible d’utiliser la réalité mixte pour interagir et afficher du contenu avec les autres utilisateurs qui seront présents sous forme d’avatar. Cette fonctionnalité n’est pour l’instant qu’accessible en version Beta mais promet de révolutionner le monde du travail à distance.

The Sandbox est le plus important des exemples de Métavers ; constitué en pixel, il permet aux utilisateurs de créer des objets (et donc des univers).

Ce métavers permet aussi de créer son propre monde et donc de proposer différents jeux, événements ou d’espaces spécifiques selon les envies. En plus de cela, chaque création sur ce métavers est disponible en NFT ce qui permet d’encourager les utilisateurs à créer des assets et objets pour les vendre. 

Il est aujourd’hui possible d’acheter des territoires dans ce Métavers.

Ainsi, le groupe Carrefour a annoncé avoir acquis une parcelle de The Sandbox pour être aux « avant-postes » du commerce en ligne dans le métavers[3].

capture d’écran carrefour /the sandbox/ twitter

Avant Carrefour, Adidas a acheté du terrain dans The Sandbox, ainsi qu’Atari ou la licence The Walking Dead. La maison de disques Warner Music vient aussi d’acquérir une parcelle qui sera dédiée à la musique.

Un aperçu de la carte des parcelles de The Sandbox et de leurs propriétaires The Sandbox

Un aperçu de la carte des parcelles de The Sandbox et de leurs propriétaires The Sandbox

Bref, le Métavers a le vent en poupe.

Sans forcément acheter un territoire sur le Métavers, comment se protéger de ceux qui viendraient y contrefaire nos marques

Parce que c’est un univers en plein développement et peu réglementé à ce stade, il convient d’être précurseurs et nous assurer que nos marques ne seront pas contrefaites sur le Métavers.

S’il fait peu de doute sur le fait que les titulaires d’une marque protégée sur le Métavers disposeront d’une action en contrefaçon contre l’utilisateur illégitime de la marque contrefaisante, encore faut-il que lesdites marques soient protégées dans cet univers.

Or, les dépôts traditionnels n’offrent pas une protection adaptée.

En effet, un dépôt classique dans la classification de Nice ne permettra pas nécessairement de protéger sa marque dans le Métavers, puisque leur exploitation aura nécessairement lieu dans une classe différente.

Comment protéger sa marque dans le métavers ?

 La protection de sa marque par les NFT

En premier lieu, il est possible d’utiliser des NFT pour protéger ses produits et leur utilisation. C’est la méthode choisie par deux géants de la grande distribution, Carrefour et Casino.

Par définition, le NFT (jeton non-fongible ou « non fungible token ») est un actif numérique unique, motorisé par la blockchain qui lui confère de manière décentralisée un certificat numérique d’authenticité unique et non interchangeable ancré dans un registre décentralisé, qui donne accès à la représentation numérique d’une variété de choses et d’expériences au moyen d’un fichier numérique associé.

Ce sont des assets virtuels dont vous pouvez faire l’acquisition et disposer comme vous le souhaitez et qui peuvent avoir plusieurs intérêts dont les suivants :

  • Vente d’expérience (pass évènements aux possesseurs de NFT,…) ;
  • Création logistique (visite virtuelle d’usine,…) ;
  • Création artistique ;
  • Formation ;
  • Interactivité / Réseau sociale (i.e. VR Chat);
  • Jeux vidéo ;
  • Utilité exclusivement financière (i.e. agents de prêts et emprunts virtuels) ;
  • Vente de charité.

Les NFT étant uniques à chaque utilisateur, il serait donc possible d’authentifier sa marque grâce à un NFT.

En effet, grâce à ce certificat, il serait possible de prouver que cette marque est unique, qu’elle est bien la vôtre, et même la suivre dans le temps, pour toucher une part des bénéfices à la revente. Car comme l’œuvre/la marque est facilement identifiable et donc traçable, on peut facilement définir un pourcentage que touche l’auteur original de l’œuvre à chaque revente.

Cette technologie procurerait ainsi une présomption forte de la titularité du droit numérique associé à l’œuvre de l’esprit/ l’objet/ la marque qu’il désigne, et assurerait la traçabilité des transactions qui y sont associées.

La limite de ce concept, est qu’il suffit de changer un pixel dans l’œuvre authentifiée par un NFT, pour qu’elle ne soit plus exactement la même et donc qu’elle ne soit plus authentifiée par le NFT.

Par ailleurs, le recours aux NFT ne saurait éradiquer entièrement les risques de contrefaçon, dans la mesure où il est tout à fait possible, technologiquement, de créer des contrefaçons sur la blockchain qui coexisteraient avec vos marques/NFT, et qui une fois créées sur la blockchain, ne saurait technologiquement être supprimées. Il existe toutefois d’autres astuces qui peuvent se révéler de réels atouts de protection, comme déposer sa marque verbale comme NFT.

La protection de sa marque par les dépôts auprès des offices de marques

En second lieu, il convient de déposer sa marque dans de nouvelles classes.

En effet, au regard de l’ampleur progressive que prend le virtuel,  une revue de la classification de Nice afin d’y ajouter des classes propres à ce domaine ne saurait tarder. En attendant, dans son actuelle rédaction,  celle-ci ne prévoit pas de classes précises pour ce domaine.

Toutefois, face à la multiplication des dépôts visant le Métavers et les NFT, certains offices des marques, et notamment l’EUIPO, ont officiellement reconnu la possibilité de recourir à certaines classes existantes afin de déposer des marques dans l’univers du virtuel, afin d’y protéger la représentation et l’utilisation de ses produits[2].

Plus concrètement, il conviendra de déposer les marques dans les classes 9 (biens virtuels téléchargeables), 35 (vente de produits virtuels) et 41 (services de divertissement destinés à être utilisés dans des environnements virtuels).

Les contrats de licence de marque ou de cession de droits, devront également être adaptés au monde virtuel.

A titre d’exemples, le réalisateur Quentin Tarantino a proposé de vendre des NFT pour des copies numériques de son célèbre scenario rédigé pour « Pulp Fiction ». Le studio Miramax a assigné le réalisateur. Au vu de l’assignation, l’affaire porte sur la question de savoir si les droits réservés par Tarantino dans la cession de droits sur le scenario de 1993, à savoir les droits d’édition et la publication du scenario, lui permettent de vendre des NFT portant sur des éléments manuscrits du scenario.

Bien sûr, si la protection des marques dans le Web3 peut soulever des difficultés d’identification et de localisation des acteurs, et donc par là même de compétence territoriale des tribunaux, celles-ci sont devenues classiques à l’ère d’Internet. Praticiens et tribunaux sont rompus face à ces complexités, et le droit des marques et d’auteur tout comme la procédure civile, offrent les outils juridiques utiles aux titulaires pour protéger leurs droits et en faire le commerce dans le Métavers.

Notre cabinet s’est doté d’une forte expertise en la matière et vous propose des solutions adaptées à chaque situation pour contrer ce flou juridique.

PLCJ Team – 08 décembre 2022

[1] www.futura-sciences.com

[2] https://euipo.europa.eu/ohimportal/en/news-newsflash/-/asset_publisher/JLOyNNwVxGDF/content/pt-virtual-goods-non-fungible-tokens-and-the-metaverse

[3] https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/pourquoi-carrefour-a-achete-un-terrain-virtuel-dans-le-metavers-20220131

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