INTRODUCTION
Depuis le confinement total effectif à l’Ile Maurice depuis le 20 mars dernier, les entreprises et les individus doivent revoir leur manière de travailler, notamment en mettant en place le travail à distance. Ces personnes, malgré les interdictions de déplacements, doivent assurer au mieux possible la continuité de leurs activités, ce qui implique à la souscription d’engagements contractuels.
Cette situation particulière permet de revisiter un outil technologique qui existe dans notre cadre législatif depuis bientôt 20 ans et qui permet de conclure des contrats malgré la distance : la signature électronique.
Cette méthode déjà utilisée par certains opérateurs économiques sur l’île mérite l’attention de ceux qui n’avaient pas encore adopté la signature électronique pour la conclusion d’engagements contractuels, cette hésitation venant probablement de l’incertitude de la validité d’une telle signature en droit mauricien.
I) Qu’est-ce qu’une signature électronique ?
La signature électronique a été introduite en droit mauricien par deux textes : la loi dite THE ELECTRONIC TRANSACTIONS ACT 2000 et les modifications apportées par cette même loi au Code Civil mauricien aux articles 1316-1 et suivants.
La signature électronique est définie comme un son, un symbole ou un processus électronique attaché ou associé à des données associées utilisées par une personne ayant l’intention de signer ou d’agréer à ces données associées, qui se traduit par l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache.
Ainsi deux éléments caractéristiques ressortent de ces définitions : d’abord l’intention de son auteur d’agréer à un document ou un acte, ensuite la fiabilité du procédé permettant d’identifier l’auteur de la signature.
La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie.
Aucune application des textes applicables par les tribunaux mauriciens n’a été identifiée à ce jour, nous notons cependant un jugement de 2008 (CONNEXIONS SERVICES INFORMATIQUE LTÉE v MAERSK LOGISTICS (MAURITIUS) LTD 2008 INT 43) reconnaissant qu’une suite de mots faisant partie d’une signature automatique au bas d’un email constitue une signature électronique mais cette décision doit être lue avec prudence, , aucune référence aux textes spécifiques à la signature électronique n’étant mentionnée.
La forme que peut prendre la signature électronique est définie largement : un son, un symbole, une copie scannée d’une signature manuscrite. Il faudra attendre les décisions futures afin de valider l’application du test de validité de ces signatures et aussi de déterminer la validité de certains autres procédés : le fait de cocher une case « J’accepte » ? un dessin ?
Ce qui est certain, c’est que la signature électronique produit des effets juridiques équivalant à la signature sur support papier du moment que lors de sa création, il peut être vérifié que la signature :
- est propre à son auteur;
- permet l’identification de cette personne;
- a été créée d’une manière ou en utilisant un moyen sous le contrôle exclusif de la personne qui l’utilise; et
- est liée aux données associées à cette signature de telle sorte que toute modification ultérieure des données soit détectable.
II) Qu’est ce que la signature électronique qualifiée (digital signature) ?
La loi mauricienne reconnait aussi la validité des signatures électroniques qualifiées appelées digital signatures. Elles consistent en une signature électronique avec un niveau de fiabilité plus élevé : il s’agit de codes uniques générés par un algorithme qui s’accompagnent d’un certificat délivré par une autorité de certification autorisée (mauricienne ou étrangère) tel que eMudhra (pour l’Ile Maurice), DocuSign ou AdobeSign (pour l’international).
Cette forme de signature s’assimile à des « empreintes digitales » électroniques. Sous la forme d’un message codé, la signature numérique associe en toute sécurité un signataire à un document dans une opération donnée.
L’utilité première de ce type de signature est de vérifier l’authenticité de la signature et de confirmer la personne du signataire.
Bien que les effets de la signature électronique qualifiée soient les mêmes que la signature électronique « classique », son intérêt réside dans une acceptation plus universelle de sa validité, qui profitera ainsi à ceux qui s’engagent dans des contrats à portée internationale.
III) L’utilisation de la signature électronique
Bien que le recours à la signature électronique concerne pratiquement tous les actes de la vie des affaires, il convient enfin de préciser que les testaments sont exclus du champ d’application par la loi.
De même, contrairement au législateur français qui a pris le soin d’exclure les actes sous seing privé relatif au droit de la famille ou les actes privés de suretés personnelles et réelles, la loi mauricienne ne connaît pas ces exceptions, ce qui a pour conséquence d’inclure ces actes dans le champ d’application de la loi. D’autres actes pour lesquels des témoins ou la présence d’un officier public est nécessaire (un affidavit par exemple) nous semblent plus difficilement pouvoir faire l’objet d’une signature électronique, mais des précisions du législateur seraient les bienvenues
CONCLUSION
Il est ainsi clair que le recours à la signature électronique est permis en droit mauricien, et nous devrions en cette période de restrictions de déplacements physiques profiter de cet outil que la technologie permet et qui fera éventuellement partie d’un outil de notre quotidien une fois le retour à la « normale » !
Pour les transactions internationales pour lesquelles il faudra toutefois s’assurer en amont de la validité de la signature électronique dans la juridiction étrangère concernée.
A vos ordinateurs, prêts, signez !
PLCJ Team – 2 avril 2020